Édition originale de cet important catalogue d’une exposition historique, 145 peintures de Monet, 36 sculptures de Rodin - « Rien que vous et moi »
Un des 20 exemplaires numérotés sur Japon, seul tirage sur grand papier.
Deux longues présentations admirables : Geffroy pour Rodin, Mirbeau pour Monet.
Depuis 1886, les deux artistes et les deux écrivains forment déjà un groupe très lié, en idéal et en amitié, une amitié qui durera jusqu’à leur mort. Mirbeau voue à Monet une admiration particulièrement fervente – il signera d’ailleurs la plupart des préfaces de ses expositions à venir.
Depuis 1882, Georges Petit, galeriste ambitieux, organise des expositions internationales dans sa somptueuse et vaste galerie construite dans le style néo-classique marbre-onyx-stuc, à macarons et oves dorés du Palais Garnier voisin – les grands vernissages nocturnes et mondains coïncident d’ailleurs avec les sorties de l’Opéra.
S’il opère surtout sur les morts, peu sur les vivants (…) dans ses magasins du Louvre de la peinture – commente le sarcastique Zola – Petit ne tient pas à laisser les tendances nouvelles à ses concurrents (les Durand-Ruel et autre Goupil), celles à la mode ou celles qui vont le devenir. Il séduit et attire les impressionnistes, les expose efficacement parmi les gloires contingentes du monde, sans redouter parfois les contradictions, exposant côte à côte Redon et Monet, Raffaëlli et Sisley, Renoir et Whistler...
Monet et Rodin ont déjà participé aux expositions internationales de Petit, en 1885, 1886 et 1887. Pour celle de 1888, alors que la majeure partie des impressionnistes a démissionné pour rejoindre Durand-Ruel, Monet, Rodin, Renoir et Whistler, qui aspirent à plus de cohésion, proposent à Petit une exposition à quatre. Celui-ci refuse d’abord, puis accepte pour celle de 1889, mais alors pour deux, et propose à Monet d’exposer avec Rodin pendant l’Exposition universelle – Rodin fait partie du jury. Le peintre écrit au sculpteur : mais rien que vous et moi.
L’installation n’alla pas sans querelles entre les deux artistes, la veille de l’ouverture, Monet se plaignit à Petit : je suis venu ce matin à la galerie où j’ai pu constater ce que j’appréhendais, que mon panneau du fond, le meilleur de mon exposition, est absolument perdu, depuis le placement du groupe de Rodin. Finalement tout fut bien rangé et l’exposition impressionna autant que la Tour Eiffel achevant son élévation. Emportée à son tour, la critique salua l’évènement exceptionnel.
Rodin exposait 36 sculptures, pour la plupart nouvelles, parmi lesquelles les Bourgeois de Calais au complet, Monet 145 tableaux couvrant sa production de 1864 à 1889. Plus qu’une exposition, ce fut pour celui-ci une véritable rétrospective, vingt cinq années de peinture acharnée, toujours en proie à l’incompréhension, aux sarcasmes et aux difficultés financières. Pour Rodin, l’heure de la reconnaissance, de la rosette et des commandes de l’État avait déjà sonné (ce qui n’empêcha pas les railleries) – Monet bénéficia un peu de sa gloire naissante.
Ex-libris Jean Leymarie
Une petite tache sur le premier plat de couverture, deux autres plus prononcées sur le dernier plat, sinon bel exemplaire adorablement relié ...